Eau douce à tous les étages

3 jours qu’il pleut ! Hé oui, c’est ça la mousson, des trombes et des trombes et des trombes de flotte qui tombe du ciel sur nos petites frimousses. Alors forcément, aller à terre devient un jeu de celui qui parviendra à passer entre les gouttes, entre les grains, entre les éclairs.bathai

Hier soir, notre voisin de mouillage n’a pas eu cette chance. Son catamaran, à 200m du nôtre, a pris la foudre en plein dans le mille. Un claquement féroce, sec, énorme. Juste le temps de se retourner vers lui, et de voir un nuage de fumée sortir du haut de son mât. Une cheminée à son moteur diesel ? Hé non, ses batteries qui ont explosées… Contents de s’être trouvé à 200m de là !

Cela n’empêche pas les enfants de passer du bon temps, quand ils ne sont pas rivés à leurs cahiers d’école, à suivre leurs leçons du CNED sous l’œil sadique et néanmoins conciliant de maîtresse Maman.CNED

Pendant ce temps, Matthieu, superbement assisté d’un Mael gigotant, bricole en tous sens sur le bateau, réparant ce qui doit l’être, mettant en marche ce qui ne l’a jamais été. Dernière merveille en date, le dessalinisateur, qui crache une eau douce délicieuse à foison, digne des meilleures sources himalayennes. Du coup, merveille des merveilles –une larme m’en coule- nous avons pu inaugurer en grande pompe notre machine à laver. Oui, c’est avec un peu de honte que nous renions l’héritage de nos ancêtres, qui de l’amiral Bouvet de Maisonneuve à Bernard Moitessier, naviguaient en slip sur leur radeau au confort rudimentaire, en véritable harmonie avec les éléments, eux, ces vrais marins.barettes

Certes. Mais avaient-ils à leur bord 3 enfants en bas âge, dont la visée approximative de la fourchette de bolognaise en direction de la bouche conduit à de fréquents accidents, dont la vessie hyperactive ne cesse son activité à nulle heure de la nuit, et nous délivre chaque matin (ou presque) des draps à l’odeur persistante, et dont la propension à faire preuve d’une créativité débordante sur les canapés du cockpit n’a d’égal que celle de Gauguin aux Marquises ? Eussent-ils eu ces 3 enfants là que je doute fort qu’ils aient alors résisté à l’installation à bord, d’un dispositif automatisé de lavage du linge.

Car ici, faire sa lessive à terre relève du parcours du combattant. Il faut déjà se taper un quai d’environ 500m pour rejoindre la terre, portant sous chaque bras un paquet de 10kg de linge. Puis 500 autres mètres d’un chemin boueux (rappelez-vous qu’il pleut) jusqu’à la laverie. Après une heure d’attente et d’une passionnante lecture des journaux thaïs , on refait notre kilomètre cette fois portant 30kg de linge mouillé, qu’il ne reste plus qu’à suspendre sur les filières du bateau. Soit environ 2 heures d’une tâche ménagère ingrate, dont nous nous passons fort bien.

C’est donc toute honte bue que nous assumons parfaitement l’installation à bord de cet outil de libération des masses populaires navigantes. Mais enfin n’en parlez pas trop autour de vous quand même…

Ce soir, 45 nœuds de vent au mouillage, on est content de ne pas être en mer à naviguer. Et la météo annonce 10 jours à venir de ce temps… Au moins, on n’attrape pas de coup de soleil.

trampoline sous la pluie

Retour au soleil

Ils auront tout essayé pour nous retenir en France :

  • Une nourriture délicieuse (mais la prise de kilos donne quand même envie de repartir)
  • Des familles aimantes et des moments de bonheur partagés (mais c’est parce qu’on se voit peu qu’on sait profiter des instants ensemble)
  • Une météo bretonne pas vu depuis 84 ans (mais l’eau, même écrasée sous un soleil de plomb – enfin de beurre salé – reste quand même à 19°C )
  • Et même déclencher une grève chez Air France annulant du même coup notre Paris-Bangkok (mais retors comme nous sommes, nous avons soudoyé un pilote de KLM pour nous faire transiter par Amsterdam).

Et nous voici donc de retour à la maison malgré ce complot des forces de l’ombre. Un peu de fatigue quand même après ces 3 vols, ce déchargement de 120kg de bagages en annexe, et son rangement, mais nous pouvons enfin reprendre nos habitudes de vie saine, sportive et mesurée.

C’est pourquoi dès le premier soir, nous partagions quelques fines bouteilles autour d’un gros barbecue chez nos amis de Sakatia en compagnie de l’équipage de Kappa, nos deux bateaux d’amis, désormais terrestres à Phuket, rencontrés tous deux en Polynésie.

Et c’est aussi pourquoi nous avons le lendemain foncé sur la plage en leur compagnie, pour profiter des 31°C de l’eau (et de l’air), pour décongeler les dernières parties du corps encore aux températures bretonnes.

Nous pouvons désormais passer en mode CNED et bricolage, afin de préparer les bateau à nos prochaines (et proches) navigations.

A très bientôt

BBQ, Tour de France et Pastaga

Qu’est ce que vous croyez ? Que vous êtes les seuls à profiter de votre Eté pour vous gâver de barbeuqious pantagruéliques, après avoir passé une journée entière à commenter energiquement l’étape du jour du Tour de France, arrosant vos déceptions devant la nullité du peloton à grand coup de pastaga à peine dilués ?

big budhaEt ben non, nous aussi, on a droit à ces petits bonheurs simples.

Bien sûr, on adapte ça à la couleur locale. Le Tour de France devient le Tour de Phuket, enfin d’un petit bout de Phuket. Sous prétexte l’aller à l’autre bout de la ville pour tenter de faire réparer notre démarreur brûlé, nous avons loué deux scooter (rigolo ici les scooters, rien à voir avec ce dont on a l’habitude), et fait une petite balade dans les environs, de points de vue en points de vue.

L’occasion d’approcher le Grand Budha, dont Mael dira qu' »il est très beau », et de s’entraîner aux baguettes sur le bouillon de nouilles.

baguettes

Au magasin de pièces automobiles, c’est assez cocasse : le fils, la sœur et la mère se battent au milieu d’un capharnaüm de pièces détachées pour savoir comment réparer notre truc.

parts_shopDu coup, ils nous donnent à manger pour que l’on patiente. Lola se retrouve à dévorer une grosse salade de papayes, on repart avec des paquets de chips, des bonbons, et un gros sac de sourires. Pas de démarreur, on l’aura à notre retour de France.

Le soir, madeleinesLola prépare une fournée de madeleines (il faut finir nos oeufs et notre beurre), et Mael et Timéo organise un grand combat entre Super Breton, et Super Thaï, à l’issue encore incertaine.combats_des_supers

Nous inaugurons notre bbq dimensions américano/australiennes. En fait, il n’est pas trop grand, et on le remplit vite de petites brochettes de poulet mariné/demi patates. Il est vidé, d’ailleurs tout aussi vite !

Le pastaga, trop rare ici, est remplacé, quant à lui, par un gin-tonic du meilleur aloi, gin indien et tonic indien, on a embarqué quelques souvenirs.

Donc inutile de nous faire envie avec vos longues soirées françaises, garnies de merguez et de crêpes au Nutella, on ne se laisse pas aller de notre côté.

bbq

Retour à la vie normale : la vie au mouillage !

Désolé désolé désolé, on vous abandonne un peu. Il est vrai qu’après le feuilleton de notre départ et de notre traversée, l’actualité devient plus terre à terre. Ou mer à terre, comme vous voudrez.

Et pourtant, nous voulons tous, amis lecteurs, vous remercier du fond du cœur. car en arrivant à Phuket, c’est plus de 350 messages que nous avons trouvé dans notre boîle d’email, ou sous forme de commentaires sur le site. Vos messages si nombreux nous ont émus, fait rire, pleurer, enfin, nous ont fait beaucoup de bien. Partager notre voyage avec vous est très important pour nous, et nous voyons que sur ce petit tronçon (certes, assez mouvementé), cela à fonctionné à merveille. Nous commençons doucement à y répondre, ça viendra, promis.

Beaucoup d’entre vous ont pensé que nous recevions vos messages et commentaires sur le bateau, mais il est important de préciser qu’en navigation, nous ne recevons que les messages par téléphone satellite, messages que vous ne pouvez nous envoyer QUE par le lien « Nous écrire » du site. Cela dit, il est aussi agréable pour nous de découvrir vos messages en arrivant à une escale « connectée ».famille_kayak

Et la baie de Chalong, sur l’île de Phuket, est on ne peut plus connectée. C’est depuis notre bateau, au mouillage, que nous surfons sur le net, comme au bon vieux temps. On retrouve aussi le bon vieux temps de la vie de gitans des mers. C’est à dire se balader en ville en tong, avec nos gros sacs de courses, de retour du supermarché le long de la 4 voies, avec les mômes en haillons (allez, j’exagère un peu), on jure un peu dans le paysage. C’est à dire que le paysage de cette joyeuse bourgade, c’est quand même une succession « club de plongée/bar à putes/club de plongée/bar à putes ». Sur la plage, c’est speed boat pour Ko Phi Phi/Speed boat pour Ko Lanta/Speed boat pour Ko Phi Phi… Parsemez le tout de vieux Australiens en quête du grand amour (de moins de 16 ans si possible), et de couples de Russes de la classe moyenne en voyage de noce, teintez l’ambiance d’une guerre des macs thaïs et Ruskovs, et vous aurez une petite idée de l’ambiance. Et encore, c’est la basse saison, donc c’est plutôt calme.

Mouai, pas trop notre tasse de thé. Nous allons vite mettre les voiles vers des lieux moins fréquentés. Tiens d’ailleurs, ça y est, nous tenons notre prochaine destination : à 4372 miles nautiques d’ici, une météo dégueulasse garantie, pas une prostituée Russe à l’horizon, aucun douanier Indien recensé, même à la retraite, de moins en moins de touristes chaque année, oui, la BRETAGNE !  Et oui, nous avons décidé d’aller rendre une visite à nos familles aimées et aimantes (n’est ce pas les familles ?), à nos amis du bout du monde, qui se languissent de nous (n’est ce pas les amis ?). Ces visites sont bien trop rares, or, nous le savons, très très importantes, et agréables. C’est en étant loin de ceux qu’on aime qu’on s’aperçoit, ben, qu’on les aime justement.

Donc, nous nous envolons pour la France dans 3 jours, et reviendrons le 26 Septembre. Évidemment, d’ici là, le site sera sûrement très calme. Nulle attaque de requins marteaux à relater, aucune indigestion de crêpes aux sauterelles à narrer (oui, on a pas encore osé tester les sauterelles grillées), même pas la moindre poulie qui lâche, ou clavette qui explose, rien que du mielleux et sentimental de retrouvailles familiales, beuark…

Avant de repartir vers les régions glaciaires, on fait provision d’eau chaude et de kayak, de sortie pour la première fois pour la plus grande joie des enfants.

 soizic_jupe

Nous avons également subit aujourd’hui un énorme choc, en visitant coup sur coup l’équivalent d’un Monsieur Bricolage et d’un Carrefour. Incroyable, « regarde, des carottes sous emballage plastique individuel ! Des joints pour robinets par centaines, des disques de ponceuse, là, à portée de main, du beurre Président (si si, demi sel, et tout et tout)… » bref, du n’importe quoi !

On s’attendait à ça en France, bien sûr, mais ici, ça nous à fait un drôle de choc. Encore trop proche de l’Inde, on ne pensait pas subir un tel contraste. Bon sang, mais qu’est ce qu’ils foutent les Indiens ? Remarque, des carottes sous emballage individuels plastique, et des rayons de bricolage longs comme les champs Élysées sous éclairage néons, sans vie, tout propres et mortels… c’est pas trop ce qu’on leur souhaite aux Indiens. Finalement, le bordel, la crasse, le bruit, les 43 vendeurs pour trouver une vis même pas de la taille demandée, ça a du charme, changez rien les gars, continuez la lutte !

Voilà, un peu décousu comme message, mais on est encore en plein atterrissage, et on a du mal à s’y faire.

On vous embrasse fort, sur la bouche, à la Russe !

KATALI saisi par les Douanes !

Triste sort pour notre bateau, les Douanes Indiennes ont finalement réussi à mettre la main dessus ! Mais si c’est vrai, puisqu’on vous le dit ! C’est même écrit dans le journal ! Mais si, le journal Tamul de Pondicherry, à la source de l’information.

Voici l’article, et sa rapide traduction, pour ceux qui ont du mal en Tamil :

Boat seized4

« Un bateau Australien a été saisi lors d’une opération des Coastguards menée par l’inspecteur Sanjay. Pondicherry est connue pour fabriquer et exporter des bateaux. Un voilier de luxe dénommé « Katali », construit à Pondicherry et acheté par un businessman Australien, a tenté de quitter les eaux indiennes aujourd’hui sans les documents nécessaires (paiement des taxes, permission du port, immigration). La Police côtière a réalisée une superbe action et saisi le bateau, qui se trouve désormais en possession des Douanes Pondichériennes ! »

Alors effectivement, nous voulions féliciter l’Inspecteur SANJAY, qui a fait un super super boulot. Un vrai travail de prestidigitateur, le Majax des temps modernes, le David Copperfield du sous continent Indien, il a saisi notre bateau sans même qu’on s’en aperçoive !

Il est TRES fort, standing ovation pour l’inspecteur SANJAY, et merci Kamal de nous avoir envoyé cette petite perle.

Sà-wàt-di Thaïlande

Comme Christophe Colomb, jadis, découvrit les Amériques à force de pousser vers l’Ouest, nous avons enfin découvert la Thaïlande à force de pousser vers l’est.

Comme prévu, au lever du soleil, nous étions en vue des premières îles marquant l’entrée de la baie de Phuket. Un Budha géant de 45m de haut nous toise du haut de sa colline, la baie est sillonnée d’embarcations hétéroclites, nous y sommes ! Dès 4 heures du matin, nous avions devant nous une cinquantaine de lumières dont il était impossible de juger de la distance, vitesse, direction.

Chacune est un petit bateau de pêche à éviter. Chacun d’eux doit d’ailleurs aussi se demander ce que nous sommes, dans le noir. Les dernières heures furent donc un peu tendues, à slalomer entre ces barcasses. Mais à 8h ce matin, ça y est, l’ancre est posée dans la baie de Chalong, au milieu d’une myriade d’autres voiliers. Ca ressemble enfin à un lieu accueillant pour notre Katali, bien fatigué des pêcheurs Pondichériens.

Une grosse baignade/douche/décrassage est nécessaire après ces 9 jours de traversée, puis nous attaquons les formalités d’entrée. Tout se passe dans un grand bâtiment au bout du quai qui fait face au mouillage. Nous nous y rendons en annexe (pour la plus grande joie des enfants qui retrouvent ce « jouet » avec bonheur) qui démarre sans problème, ça fait plaisir.

Et là, c’est le choc pour nous qui sommes habitués aux normes Indiennes (3 mois de démarches pour réussir à quitter le pays) : Un premier bureau d’accueil ou on nous fait remplir un formulaire sur ordinateur, puis un passage rapide dans 3 bureaux flambants neuf ou les fonctionnaires de l’Immigration, puis des Douanes, puis du Port, nous tamponnent quelques trucs en échange de nos photocopies de passeports. en 30 minutes, tout est réglé ! Et on s’est même pas fait racketter !

Pas l’ombre d’une attente de backshish pour accélérer la procédure ! On devrait envoyer quelques fonctionnaires Indiens en rééducation par ici. Balade à terre, drôle de contraste après ces 9 jours. Tout est nouveau ici pour nous, l’écriture, la langue, la tête des gens, la façon de conduire, la nourriture.

On s’arrête dans une gargote ou on mange délicieusement, on passe au Yacht Club pour demander si une bouée est libre, on achète une SIM card (notre numéro Thaï : +66 927 369 987), on appelle nos copains du voilier Kappa, Karine et Mistral, rencontrés en Polynésie en 2011, que l’on retrouvera avec plaisir ce soir. C’est pour Soizic et moi un énorme soulagement d’être enfin arrivés.

C’est l’aboutissement d’un projet initié il y a 4 ans, quand nous avons décidé de construire notre bateau en Inde, un pays pourtant aux antipodes des habitudes de la voile de plaisance. Poser l’ancre ici est, pour nous, comme donner un grand coup d’éponge sur un tableau bien rempli, saturé par des problèmes n’ayant rien à voir avec notre soif de voyage, de découverte et de liberté, problèmes qui nous ont englués ces 2 dernières années. C’est le retour à une vie de nomades libres d’aller et venir, libre de décider d’avancer, de reculer, d’accélérer, de ralentir, sans que qui que ce soit ne décide pour nous.

En 2 mots, c’est le retour au bonheur. Sauf peut être pour Mael, qui, après sa promenade à terre, n’a su que nous dire « c’est quand qu’on part de cette planète ? »… rien compris celui là, il va falloir le rééduquer aussi ! En attendant, zou, les paupières des capitaines sont lourdes, très lourdes, et il est temps de reposer tout ça pour une sieste réparatrice…