Troisième sortie en mer

Les sorties se suivent et ne se ressemblent pas. Notre départ étant perpétuellement décalé (nous avions prévu de partir ce Dimanche), nous avons pu, aujourd’hui, amener naviguer les ouvriers qui ont travaillé dur sur notre bateau depuis presque 4 ans. Nous leurs avions conseillé de ne pas emmener femmes et enfants, c’est pourquoi ils les ont tous emmenés.sortie3bis

Or, il faut savoir que l’eau n’est pas un élément habituel pour le Tamoul. Certes, il en boit, chaude et parfumée (le Thé), il en voit tomber (la mousson), mais la mer a toujours été vue comme un ennemi (et le fait que le Tsunami de 2004 n’ait pas emporté que sa belle-mère n’a pas arrangé les choses).

Et l’eau, aujourd’hui, contrairement aux autres sorties, avait décidé de s’agiter un peu. C’est donc face à de belles vagues de 2 mètres qu’il a fallu sortir et rentrer dans la passe. Passe un peu stressante puisqu’il faut y effectuer un virage à 90° à ras des cailloux, sur 10 mètres de large (le bateau en faisant 8 !).

Donc, une fois dehors, nos passagers n’en menaient pas large, et les rires de soulagement de s’être sorti de là ont rapidement fait place à… ben, du vomi ! Disons que sur la vingtaine de passagers indiens, une dizaine a fini l’estomac par-dessus bord (s’il avait le temps) ou sur le pont (par manque de temps), voir, sur le plancher en teck du cockpit (par manque de motivation). Bébés allaités, femmes en saris, ouvriers fiérots, tous y sont passés.

Cette ambiance, disons, peu amarinée, alliée au vent quasi absent, nous a fait vite rejoindre notre petit port tranquille, et c’est assez rapidement que tout ce petit monde a regagné la terre ferme, le sourire aux lèvres.

Ce fut l’occasion pour Lola, Timéo et Mael de faire leur première sortie en mer, avec des copains à bord (ça change des fêtes de pirates déguisées), et de rentrer tout fiers parce que eux n’avaient pas été malades !

 

Deuxième sortie en mer

Ahhhhh, la belle sortie ! Nous pensions, enfin les données officielles du Port of Pondicherry, nous annonçaient la même hauteur d’eau à marée haute qu’à notre première sortie. C’est donc plein d’entrain à l’idée de refaire une plongée de l’extrême que nous avons quitté le quai, avec notre chargement de copains équipiers habituel. IMG_0437  IMG_0487
Au bout de 200 mètres, nous ancrons afin de libérer l’hélice tribord, toujours empêtrée depuis notre précédente sortie. Petite douche au Chlorox® pour Matthieu qui commence à y prendre goût, et nous reprenons le chenal, prêts à draguer le fond, pour découvrir qu’il y avait 30cm de plus que la dernière fois ! Une sortie de passe donc assez paisible, bien que la confiance dans les données hydrographiques de la Marine Indienne en prenne un coup.
Une fois dehors, 10/15 nœuds de vent, une belle mer calme. Ce fut l’occasion de gentiment pousser Katali à 12 nœuds, vitesse facilement atteinte sous gennaker, mais avec beaucoup d’émotion pour nous. IMG_0485Entendre la coque se mettre à vibrer, voir les étraves fendre la mer, le bateau traçant ses 2 sillons puissants comme le bœuf charolais labourant la terre fraîche (peut être aurais-je pu trouver plus belle analogie), beaucoup de belles promesses pour nous.IMG_0448

Première sortie en mer

Ca y est, il avance ce bateau. Il a tiré ses premiers bords au large de Pondicherry, avec une joyeuse bande de copains à bord.

Bon, ça ne s’est pas fait simplement. Le chenal, puis la passe de sortie, sont vraiment très étroits. Donc ça n’a pas loupé, on a touché en sortant, dans le canal. Bon, pas dramatique, c’est de la vase me direz-vous, mais sur la vase, il y a 3 mètres de déchets divers et variés, entassés depuis l’invasion de l’Inde par Genghis Khan, à côté desquels les réserves secrètes du Musée Archéologique du Caire ressemble à une collection de boîte d’allumettes.

Donc, lorsque notre hélice tribord est venue remuer la vase à quelques centimètres, elle a ramassé, en quelques secondes, environ 1 mètre cube (je n’exagère pas), de déchets divers (filets, cordages, lanières plastiques, câbles métalliques, tissus, casques mérovingiens…). Le moteur, devant cet assaut massif, a calé, impossible à redémarrer (nous n’avions pas encore vu la bête).

Avec un seul moteur, difficile de se sortir de là, le bateau tourne en rond. En jouant (enfin, jouer…) avec l’ancre, on a réussi à se remettre au milieu du « chenal », pour ancrer.

C’était donc le moment pour Capt’ain Matthieu de sacrifier quelques années de sa vie en plongeant dans ce qui ici, tient lieu d’eau de mer. En effet, la composition de ce liquide, authentifiée par un institut de santé Suisse, est la suivante :

  • 16% de caca
  • 28% de pipi
  • 17% de curry
  • 6% de plastique
  • 14% de mercure
  • 5% de pneu
  • 11% de plomb
  • 13% d’acide muriatique
  • 0,1% de machine à laver
  • 4% d’eau (quand même)
  • 26% non identifiable (probablement d’origine extraterrestre, mais qui pue !)

Oui, ça fait pas 100%, mais les Suisses sont pas très fort en chiffres.

Ca donne donc un liquide marron (le caca !), dans lequel on voit à peine à 10cm, oui, 10cm !IMG_5199

Je ne m’attarderai pas sur la demie heure passée en solitaire la dedans, à tailler dans le « blob » au couteau, je ne décrirai pas l’état de mes doigts ce soir après quelques coups moins bien ajustés que les autres, ni celle de ma peau, couverte de bubons purulents, ne souhaitant pas vous gâcher votre journée.

Après une demie-heure donc, l’hélice était libre. Par acquis de conscience, un coup d’œil à l’autre hélice a permis de faire durer la partie de plaisir, elle aussi ayant décidé qu’il faisait un peu frisquet là-dessous.

 On repart donc, bien refroidis, et bien rassurés pour attaquer la passe. Ça s’est en fait pas trop mal passé, puisque dans ce que nous appellerons, pour vous donner une idée « le virage de la mort qui tue », nous avions 20 confortables centimètres sous la quille, un vent de travers, et des déferlantes de 4 mètres (bon, pour les déferlantes, Soizic me dit que j’exagère, mais il est possible que mon séjour dans le « machin qui pue » m’ait poussé au délire).IMG_5178

Enfin libres à la sortie, nous avons pu essayer plein de voiles, d’écoutes, de drisses, de ris, de pilotes, de camembert, et d’alcools forts (pour me désinfecter).

Le retour fut aussi tendu qu’à l’aller. Dans le chenal, là où nous avions touché, un gros bateau de pêche s’était échoué (ha, quand même, ça arrive même aux autochtones !). Un fier camarade essayait de le sortir en tirant dessus, mais rien n’y fit, le bougre doit encore y dormir (la marée était descendante).

Du coup, ne sachant plus trop où passer (du côté où ce con s’est planté, ou du côté où nous nous sommes plantés ce matin, on a décidé de passer entre les deux, et donc, de se planter ! Enfin juste racler le « blob ». Donc les hélices ont à nouveau soulevé la bête, et l’hélice babord s’est mise à bien vibrer, mais sans caler. On a pu rentrer au port, mais Capt’ain Mat, désormais munis de 3 jambes et 12 doigts (je tape plus vite), est bon pour une autre petite plongée de nettoyage (et croyez, moi (je sais, c’est dur), mais au port, l’eau est encore pire que dans le chenal…).IMG_5187

Bref, un petit message concis pour vous dire que le bateau s’est bien comporté, pas de souci détectés (ou si peu), et que ça fait du bien.

On remet les réjouissances Samedi et Dimanche, avec sûrement plein de merdes dans les hélices à nouveau (on s’est planté à marée haute, je ne vois pas pourquoi on recommencerait pas).